Les débats de Nachaz 9 juin 2017 : Combattre la corruption. La gauche et les nouveaux mouvements sociaux

En parallèle avec la revendication de la liberté, de la dignité et de la justice sociale, Le rejet de la corruption est resté un noyau dur tout au long du processus révolutionnaire en Tunisie. On peut même affirmer qu’il a déterminé la structure du discours politique de tous les partis et organisations. Il a probablement influencé le choix des électeurs lors des précédentes élections. De tous les bords, les récits et discours contre la corruption se sont multipliés. Paradoxalement les politiques gouvernementales sont restées muettes et passives. On les a mêmes suspectées de manque de sérieux voire de complicité avec les corrompus. Puis, subitement, depuis le 23 mai dernier, on a assisté à un retournement remarquable dans la position officielle, après la déclaration de « la guerre à la corruption » par le Chef du gouvernement, guerre longtemps attendue et dont on avait presque désespéré de son déclenchement. Cela s’est passé quelques heures après l’arrestation de symboles de premier plan impliqués dans la corruption, la contrebande et l’enrichissement illicite. Ainsi sommes-nous face à une position politique inédite, en attendant que se fasse toute la lumière dessus. Ce qui nous importe à l’occasion de cette rencontre, c’est aborder le sujet et en comprendre les tenants et aboutissants ainsi que les processus y ayant conduit, et ce en interrogeant les points de vue des différentes composantes de la gauche tunisienne.
Que s’est-il passé entre le discours du 10 mai du président de la république, avec son ton menaçant et son acharnement à faire passer la loi sur la réconciliation avec le soutien de la majorité parlementaire et de la coalition gouvernementale, et le déclenchement de « la guerre à la corruption », douze jours après, sachant que la préparation d’une telle guerre ne peut se faire en quelques heures ni en quelques jours, et qu’il est plus probable qu’elle a commencé depuis un mois ? Quelles sont les motivations d’une telle guerre ? Est-ce la conscience que l’Etat est en danger face à l’hégémonie des lobbies de la corruption ? Est-ce pour répondre aux engagements tenus vis-à-vis des puissances et des institutions monétaires étrangères ? Est-ce l’évolution de la situation régionale et les changements géostratégiques après l’accession de Trump au pouvoir aux USA et Macron en France ? Quid des changements intervenus sur la carte des alliances au Moyen-Orient et leurs répercussions sur la Libye ?
De même, que se passe-t-il au sein-même du gouvernement ? Le « wifak » constitue-t-elle un adjuvent pour que le Chef du gouvernement aille plus loin dans cette guerre, ou, au contraire, un frein à cette entreprise ? Quel rôle de « la gauche gouvernementale » dans ces choix ? A-t-elle contribué à cette orientation, ou a-t-elle été dépassée par les événements ? Quelle efficacité peut avoir sa présence au sein du gouvernement ?
Ces questions peuvent en ramener d’autres sur le sens de la coalition, sa pertinence politique à cette étape précise de la transition démocratique, face à la notion de lutte et de résistance pour faire avancer la roue de l’histoire et faire reprendre confiance et espoir aux Tunisiens et pour sortir de la situation d’inaction et de statu quo due à la passivité, pour le moins, des gouvernements successifs.
Une autre question se pose sur le rôle de la société civile et des forces politiques et sur la position à prendre par rapport à la difficile équation entre la nécessité de favoriser un climat de stabilité sociale et sécuritaire dans le pays, surtout dans les régions frontalières, et le rôle des mouvements sociaux et populaires pour pousser le gouvernement et les décideurs à prendre des mesures audacieuses dans « la guerre » à la corruption. Le changement radical intervenu dans les positions officielles le 23 mai, remettant celles de la déclaration du 10 mai, n’est-il pas le résultat de la pression populaire dans les régions et des mouvements nouveaux des jeunes, à l’instar du sit-in de Tataouine au Sud et de la campagne « Manich msamah », et autres mouvements sociaux qui commencent à remplir le vide laissé par l’opposition et la gauche traditionnelles, sur la scène de la lutte sociale et du militantisme ?
Nous avons essayé de répondre à toutes ces questions et à bien d’autres encore, et ce avec la participation de Mme Layla Riahi, membre de la campagne « Manich msameh » et M. Ahmed Souab, en sa qualité de juge spécialiste en droit administratif, et une des voix qui compte dans la société civile..
Maher Hanin a introduit la rencontre au nom de Nachaz qui a organisé cette soirée en partenariat avec la Fondation Rosa Luxembourg. Fathi Ben Haj Yahia a animé, comme d’habitude, ce nouveau « Débat de Nachaz ».
 



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