Bizerte 2013 : La Vierge, les Coptes et moi de Namir Abd el Massih : ma JVC, Zaafrana et mon enfance

Par Hakim Guesmi
La Vierge, les Coptes et moi, le premier long métrage documentaire du cinéaste Copte Namir Abd el Massih, m’a beaucoup touché. C’est l’histoire d’un film en train de se faire. Dans l’une des premières séquences, Namir regarde en famille une vidéo censée montrer une apparition de la Vierge. C’est à ce moment-là  qu’il a l’idée de faire un documentaire sur ce phénomène mystérieux. Pour réaliser son projet, il part en Egypte. Il rencontre beaucoup plus de difficultés qu’il ne l’imagine (la non coopération des institutions religieuses, la difficulté de recueillir des témoignages et d’accéder aux archives, etc.). C’est ainsi que le projet change en cours de route lors d’un déplacement du Caire vers la Haute-Égypte où habite la famille de sa mère malgré l’interdiction de cette dernière qui ne veut absolument pas que sa famille soit filmée.
Ce changement de projet est amené de manière progressive et Namir finit par opter pour une mise en scène d’une apparition de la Vierge dans son village dont il mobilise tous les habitants de même que les membres de sa propre famille. Entre temps, il reçoit sur sa boîte vocale des messages de son producteur, exaspéré, ne croyant plus à son projet et la mère devient productrice de son film malgré l’interdiction ferme qu’elle a exprimée. Toutes les étapes de la fabrication défilent devant nos yeux : le casting, le tournage, le  visionnement des séquences montées en présence des acteurs et le tout se termine par la projection. La séquence qui m’a le plus marqué, c’est celle de la projection et où les acteurs présents qui ont joué pour la première fois de leur vie se voient sur un écran. Leurs réactions varient entre l’étonnement et le rire que suscite leur propre image projetée. Il y a un va-et-vient entre les images projetées et les plans où on voit les réactions des spectateurs qui ne sont autres que les acteurs avec une alternance entre plans relativement larges, plans rapprochés et gros plans. Tout cela permet de mettre en valeur les émotions des spectateurs émerveillés par leur image et par la magie de la projection.
Ceci m’a rappelé mes souvenirs d’enfance et surtout notre première caméra familiale, une ancienne JVC si mes souvenirs sont bons. C’était en 1997, lors de l’un de nos retours annuels au village de mon père, Zaafrana, un village isolé où il n’y avait même pas d’électricité et accessible uniquement par une piste difficilement praticable. C’est lors de ce retour à Zaafrana qu’on a filmé avec mon père toute la grande famille (Amor, Ltaïf, Aïda, Amel, etc.). On les a filmés au moment du réveil et du départ, à l’aube, vers nos champs d’oliviers. On a aussi filmé une partie de chasse au lapin, le dîner de famille, la cueillette des olives, la récolte (qui était bonne cet année-là), mes petits cousins en train de jouer aux billes… Je ne me souviens plus du reste. Je me rappelle par contre que pour visionner ce qui a été filmé, on a utilisé une télé qu’on avait apportée avec nous et qui pouvait fonctionner avec des piles et qui, il me semble, était en noir et blanc. En regardant le film de Namir Abd el Masih, j’ai retrouvé un peu les mêmes réactions : émerveillement, fous rires, une certaine timidité chez les femmes surtout, perplexité, comme s’ils se demandaient comment ils avaient pu se trouver à la télévision…

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