Les mouvements sociaux… corporatismes ou révolution ?

La Révolution a permis de déverrouiller l’espace public. Des mouvements sociaux de type nouveau ne cessent de s’exprimer et des catégories précarisées et exclues, jusque là silencieuses, donnent de la voix. Tout au long de la décennie qui vient de s’écouler, on a d’abord constaté l’amplification continue des grèves ouvrières. Puis, d’autres formes de mobilisations inédites se sont multipliées et déployés à travers le pays comme les sit-in, les barrages sur les routes, les grèves de la faim, les marches vers la capitales, les différentes expressions des arts de la rue…
Nouveaux mouvements, nouvelles revendications, dans les villes, petites ou grandes, dans les campagnes, d’ampleur inégale, mais dont le rythme est toujours soutenu. Les revendications portent à peu près sur tous les aspects de la vie sociales : le droit à l’emploi bien sûr, au travail décent, à la santé, à l’eau, à un environnement sain, à l’accès aux ressources naturelles, à l’infrastructure… Dans ces flots de mouvements hétérogènes, plus ou moins organisés, se distinguent quelques expériences structurées et durables : celles de l’Oasis de Jemna, Manich msameh, Petrofac à Kerkenna, Le Kamour à Tataouine, la coordination des travailleurs des chantiers, les campagnes Fech nestannaou, Taallem oum…
Cette mobilisation sociale inégale et permanente est une mise en accusation permanente de l’ordre social ébranlé par la Révolution mais toujours là. Elle constitue la marque du soupçon indélébile sur des inégalités inamovibles. Elle démontre tous les jours l’inanité du fameux modèle de société à la tunisienne et de la miraculeuse cohésion qu’il est censé receler.
Les inégalités sont dans la rue, dénoncées à tue-tête par les « sans grades » et les laissés pour compte.
En même, l’éparpillement et le développement inégal des différents mouvements pose la double question de l’organisation et de l’impact… Sont-ils à appelés à se fondre en une lutte commune ou à demeurer éparses et sans lendemains… Sans doute est-il prématuré de parler de mouvement social, que les commentateurs utilisent par commodité.
La troisième question se rapporte à l’effort d’élucidation et d’élaboration théorique qui incombe aux nouveaux acteurs politiques. Et à l’articulation nécessaire entre la question des droits sociaux et des libertés individuelles, combien sensible dans la Tunisie postrévolutionnaire.

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