Visite à la région Houaidia

1er et 2 novembre 2022

UNE RÉVOLUTION EST PASSÉE PAR LÀ.

Carnet de bord d’une enquête en cours

 

 

Une équipe de l’association Nachaz a effectué le 1er et 2 novembre 2022 une visite à El Houaidia qui se situe à quelques kilomètres de la ville de Tabarka. Houaidia, région montagneuse, fait partie de la délégation de Nadhour, gouvernorat de Jendouba.

Houaidia a été marquée au cours des deux dernières années par la lutte menée par les habitants pour sauvegarder la source d’eau qui dessert la région après qu’une entreprise d’extraction de pierres rocheuses ait atteint la nappe phréatique et causé la pollution de la source. Un combat a été alors mené contre l’entreprise et le gouvernorat pour mettre fin aux infractions commises à l’égard des lois, de l’environnement et du droit des habitants à une eau  saine.

Lors de cet épisode, Moncef Houaidi a joué un rôle fédérateur. Il est devenu la figure emblématique de ce combat qui devait obtenir gain de cause après la décision de justice en faveur des habitants, obligeant l’entreprise à arrêter ses travaux d’extraction.

L’équipe qui s’est déplacée à Houaidia a pu échanger avec les habitants autour de trois questions en relation avec le branchement des habitations au réseau de la Sonede ; le développement des activités agricoles et le projet d’une ferme culturelle initiée par Moncef Houaidi   :

  • Malgré l’existence d’un projet de branchement des habitations de la délégation de Nadhour au réseau de la Sonede, et dont les travaux ont atteint un stade d’exécution relativement avancé, aucune suite n’a été donnée aux promesses tenues pour effectuer le branchement des maisons depuis deux ans. A cause de l’absence d’eau potable dans les maisons, des centaines de femmes passent quotidiennement entre 3 et 4 heures et parfois plus à se ravitailler en eau dans des bidons et les ramener à dos d’âne jusqu’à leurs maisons. Les témoignages recueillis auprès de femmes et d’hommes en colère, à la source « Ain Askar », évoquent les souffrances quotidiennes, l’attente, la frustration et la déception à l’égard des pouvoirs publics qui ne font rien pour assurer un droit élémentaire, celui de l’accès à l’eau. Toutes et tous sont unanimes pour considérer que la qualité de la vie serait autre si l’eau était disponible à la maison. « Nos enfants quittent tous la région vers la ville de Tabarka ou vers Tunis afin de bénéficier du droit à l’eau car il n’est pas possible de vivre sans eau » répètent la majorité des personnes entendues.
  • Le développement des activités agricoles constitue une question cruciale pour les habitants de la délégation Nadhour. La croissance souhaitée dépend étroitement de la disponibilité de l’eau et des puits nécessaires au développement des plantations. Le témoignage de Ali, un des habitants de la région, est particulièrement éloquent sur les difficultés en lien avec le creusement des puits et le manque d’eau, l’absence d’aides techniques… En raison de ces défaillances, les jeunes quittent la région, et parfois le pays, car « l’Etat n’existe pas », « l’État n’accomplit pas son rôle », « si le minimum était fourni, la terre aurait un autre visage » souligne Ali…

Pour autant, l’unanimisme n’est pas la règle parmi les habitant quant au moyens de réagir. Ali pense que les manifestions ou autre type de revendications peuvent être contre-productives, l’essentiel c’est que les médias fassent parvenir la voix et les griefs des habitants. Moncef estime de son côté que les pouvoirs publics ne réagissent que si les habitants revendiquent leurs droits à travers des manifestations devant le siège des instances publiques concernées.

  • Après avoir gagné la bataille environnementale, celle de mettre fin à la pollution de la source d’eau, Moncef, fer de lance de cette lutte, a décidé de développer un projet de ferme culturelle qui allie activité agricole et activité culturelle. A côté des plantes auxquelles M.H. accorde une attention particulière, la bibliothèque avec ses livres, romans et livres pour enfants constitue l’espace phare de la ferme et de toute la délégation qui ne compte aucun espace culturel hors l’école primaire. Les enfants que nous avons rencontrés commencent à fréquenter la bibliothèque et à emprunter des livres. Le projet fait cependant face au problème de la pérennité des dons ou des financements.

La résistance des habitants de Houaidia et de la délégation Nadhour, les luttes qu’ils mènent en faveur d’une meilleure qualité de vie, l’alternative culturelle que propose la ferme de Moncef Houaidi constituent des repères et des point d’appui pour des initiatives de soutien.

 



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